Le 16 mars dernier, Séverine et Vanessa (enseignantes ressource à Fénelon, Grasse) ont participé au colloque : “Pédagogies, neurosciences et numérique, des pédagogies réinventées : un avenir pour chaque élève ?”. Elles en sont revenues riches de nouveaux savoirs et de nouvelles idées qu’elles partagent avec nous… Merci les filles ! 

Alain Raguenaud, président d’Apprendre et Réussir ouvre le colloque en rappelant l’importance de promouvoir des pédagogies innovantes pour les enfants en difficulté et résoudre ainsi le décrochage scolaire et lutter contre l’inégalité scolaire. Il présentera également les convictions de la fondation :

  1. L’association des neurosciences, du numérique et de la pédagogie est un levier
  2. L’ouverture et la diversité sont indispensables
  3. L’excellence n’est pas en contradiction avec la résorption de l’échec scolaire

Ce colloque cherche à répondre à 3 questions : où en sommes-nous ? Qu’est-ce qui marche ou ne marche pas ? En quoi les approches nouvelles apportent-elles des solutions ?

1ère table ronde : le numérique : espoirs, conditions de réussite, limites (avec la présence, entre autre de Thierry Karsenti)
Le numérique bouleverse plusieurs choses : l’aménagement de la séquence dans le temps et dans l’espace ainsi que la posture de l’enseignant et de l’élève. Il accélère le travail en réseau et/ou en ligne et il accélère le savoir.
Le projet pédagogique reste la priorité mais il s’accompagne d’un projet matériel, d’un projet formation et d’un projet ressource. L’ENT (espace numérique de travail) va obliger les enseignants à ré-expliquer l’école et le numérique va faire passer l’enseignant derrière l’épaule de l’élève. Les conditions de réussite du développement du numérique passent par des incontournables :Travailler en équipe, rechercher des ressources, partir du “déjà-là” des élèves. Il est clair également que l’enseignant devra aider l’élève à analyser le savoir. Les modalités de regroupement changent également, travail en solo, à deux, en groupe… Le rôle de l’enseignant change, il doit définir des parcours individualisés pour aider les enfants à suivre le parcours normal, continuer à faire écrire les élèves et produire des cours linéaires pour ne pas les perdre (la “toile” les perd). Les outils numériques sont attrayants mais il faut continuer à diversifier pour éviter l’ennui. L’autonomie et la curiosité ne sont pas naturelles, il faut les développer d’où l’intérêt du numérique. Il est encore un peu tôt pour mesurer les effets positifs du numérique. Que voit-on actuellement ? Des élèves plus engagés, plus motivés, plus autonomes aussi dans les séquences, de multiples actions d’apprentissage mises en place, une amélioration de l’écrit et de nouvelles “portes d’entrée” pour les élèves à Besoins Particuliers, des apprenants qui collaborent davantage, sans oublier le développement du “savoir-faire avec les outils numériques” indispensable pour utiliser les médias de façon intelligente et éclairée.
Cependant les intervenants rappelleront qu’ il faut rester prudent sur l’usage positif du numérique,  ce n’est pas une formule magique et il faudra encore du temps pour mesurer réellement les effets positifs. Ils rappellent également que pour apprendre autrement et rendre l’apprenant conscient de son apprentissage il faut savoir l’accompagner d’où la nécessité de former les enseignants. Le changement ne se décrète pas,  c’est un long processus, il faut donner confiance aux enfants face à un numérique qui se développe avec une grand rapidité et une grande violence, il s’agira de donner du sens et d’aller à son rythme.

Quel rôle peuvent jouer les encadrants, les équipes de direction des établissements ?

Là encore, pas de “leçons” mais des conseils avisés : donner de l’envie à l’équipe, partager des diagnostiques, partager des idées et avoir de l’audace, développer une pédagogie de projet, faire oser les gens et leur en donner les moyens,  c’est-à-dire lever les freins techniques et financiers ( 😥 ), ouvrir les classes et proposer des temps d’échange, valoriser ce qui est fait pour l’entretenir et le développer.
Le numérique est une tendance irréversible en éducation, il change la façon d’apprendre et a un impact réel sur l’apprentissage.
On ne peut plus dire « Faut-il du numérique ? » mais « Comment faire avec le numérique ? »

2ème table ronde : Vers des pédagogies adaptées aux cerveaux des apprenants ? En présence, entre autre, d’Olivier Houdé

En introduction, Olivier Houdé nous rappelle qu’un organisme passif n’apprend pas d’où l’importance de prendre conscience du fonctionnement du cerveau en éducation. Éduquer est à la fois un art et une science. Il rappelle également que l’association de 3 étapes : permanence de l’objet, nombre, catégorisation permet le raisonnement.
Il explique ensuite les 3 systèmes cognitifs de notre cerveau :

 💡 le système heuristique : système rapide mais peu fiable (arrière du cerveau)

 💡 le système algorithmique : système fiable mais plus lent (avant du cerveau)

 💡 le système inhibiteur : clef de l’intelligence qui permet d’inhiber le système heuristique et de développer le système algorithmique (situé dans le cortex préfrontal, siège des fonctions exécutives).

L’éducation permet de passer du système heuristique au système algorithmique, elle permet de prendre conscience du 1er système et d’activer le 2nd.

Olivier Houddé rappelle l’importance de dialoguer avec l’élève pour l’aider à “reconfigurer” son cerveau et à développer son intelligence mais comme on ne peut pas revenir au préceptorat, il devient alors intéressant d’utiliser le numérique et les jeux.

C’est en train de devenir une évidence, les enseignants vont devoir se former pour connaître les progrès sur le fonctionnement du cerveau et pour ne pas devenir “maltraitant” sans le vouloir. Nous projetons notre mode de fonctionnement à tort, on oublie souvent la charge sémantique et la difficulté de la double tâche car on a oublié que nous savons déjà et qu’il faut accompagner les étapes de l’apprentissage et décortiquer la compétence. D’où l’importance en classe de travailler sur l’attention, la mémorisation et la compréhension. Expliquer aux enfants comment fonctionne leur cerveau, leur faire prendre conscience de ce qu’ils utilisent dans leur cerveau et leur montrer leurs performances est une vraie piste “neuropédagogique” à explorer.

Ecoutons Olivier Houdé sur cette question “révolutionnaire” d’apprendre à inhiber son cerveau :

C’est avec grand intérêt que nos “reporters d’un jour” ont écouté la conférence de clôture présentée par Jean-Michel Blanquer, ancien recteur de l’académie de Créteil, ancien directeur de l’enseignement scolaire et directeur actuel de l’ESSEC (Ecole Supérieure des Sciences Economiques et Commerciales). Elle avait pour titre :
 

L’école de demain, quelle place pour les sciences cognitives et le numérique dans la transformation de l’école ?

“Prenons conscience des 3 piliers pour préparer l’école de demain :
les sciences cognitives,
la comparaison internationale,
l’expérience et l’expérimentation”

A la suite de ce préambule, Jean-Michel Blanquer déclinera  ses “recommandations” pour les différents cycles de l’Ecole :

La maternelle est l’école du langage, elle est primordiale pour le développement du vocabulaire et la prise de conscience des premières notions pré-grammaticales et phonologiques. L’épanouissement de l’enfant peut aller avec le travail et les objectifs pédagogiques, il n’y pas d’opposition bien au contraire.

L’école élémentaire doit développer une pédagogie explicite, exigeante et progressive.

Le collège demande une personnalisation du parcours, il faut y développer une attitude offensive et non défensive pour construire la société de demain. Il s’agira d’augmenter les choix des enfants, les laisser plus libres d’avancer à leur rythme avec des groupes de compétences sur toutes les années de collège. L’article 34 de 2004 permet de déroger aux règles et d’ouvrir le système pour essayer des innovations, pour développer les élans collectifs afin d’aménager le collège.

Il faut développer des équipes de direction avec des personnes qui tournent et se renouvellent pour changer l’organigramme et créer une dynamique.

Le lycée professionnel forme à la fois des « managers et des ingénieurs », il faut donc augmenter l’apprentissage et les passerelles.

Le lycée général doit s’ouvrir de bac -3 à bac +3, nous avons le devoir, à cet âge, de tenir un discours positif et beaucoup moins stressant que celui qui est tenu aujourd’hui.

“L’école de demain sera un état d’esprit et non juste une accumulation de savoirs.”

Compte-rendu réalisé par Séverine Kastler et Vanessa Carinci.

 💡 En attendant les vidéos du colloque de Mars 2017 (disponibles sous peu), retrouvez celles de 2015 :

« Révolution 3.0 et progrès des neurosciences, quelles conséquences sur les pratiques pédagogiques ? »

Pêlemêle_sur_la_mémorisation

➡ Signalé par Vanessa : Atelier thématique : Des pistes très concrètes d’introduction des sciences cognitives dans la classe : Daphné Jacamon, professeure de lettres et Frédéric Guilleray, professeur de SVT au lycée, formateurs académiques sur l’application des sciences cognitives en situation d’apprentissage )
http://sciences-cognitives.fr/

 ➡ Application « plickers »
1PC, 1 téléphone pour flasher les cartes, des questions/réponses
Cette application permet de vérifier rapidement des données acquises ou de faire une
évaluation diagnostique, le résultat est anonyme sur le TBI mais un tableau
récapitulatif archive les différents quizz et permet de mettre en place une aide
personnalisée. (Vanessa a testé : top pour réaliser des quizzs en classe !)
 ➡ A propos de Anki (cf le pdf  “pêle-mêle sur la mémorisation”)
➡ Des pistes pour l’attention : Colloque Cachan – Atelier – Pistes concrètes

L’enfant qui battait la campagne

Vous me copierez deux cents fois le verbe :
Je n’écoute pas. Je bats la campagne.

Je bats la campagne, tu bats la campagne,
Il bat la campagne à coups de bâton.

La campagne ? Pourquoi la battre ?
Elle ne m’a jamais rien fait.

C’est ma seule amie, la campagne.
Je baye aux corneilles, je cours la campagne.

Il ne faut jamais battre la campagne :
On pourrait casser un nid et ses oeufs.

On pourrait briser un iris, une herbe,
On pourrait fêler le cristal de l’eau.

Je n’écouterai pas la leçon.
Je ne battrai pas la campagne.

Claude Roy (“Enfantasques”)